Quelques réflexions sur la domination exercée par les adultes au contact des jeunes.
Lors de mes stages (de formateurice pour adulte), j’ai eu à plusieurs reprises des jeunes publics dits difficiles.
Ce qui me choque le plus dans ces interventions, ce ne sont pas les propos sexistes racistes et transphobes (c’est justement pour ça que je suis là), mais les comportements des adultes encadrants avec les jeunes. Cette foutue domination adulte.
Le prof qui nous accueille nous explique que c’est « la pire classe de l’établissement ». Il est là pour cadrer les éléments perturbateurs et les sortir si besoin. Rien que là, je tique.
Les élèves entrent. Il demande à ce qu’iels enlèvent leur manteau. Il passe d’un relatif calme aux hurlements en moins de deux minutes. Certain·es s’en moquent, iels garderont leur manteau jusqu’à la fin. C’était bien la peine de les accueillir en hurlant, ce n’était qu’une façon d’essayer d’asseoir sa domination.
Je l’ai vu mal leur parler. À plusieurs reprises. En se justifiant ensuite « ils sont difficiles ».
Alors oui, l’intervention était chaotique, ça partait dans tous les sens, iels ont testé nos limites… mais iels n’ont pas manqué de respect. Iels étaient plein de préjugés, de questions, mais étaient aussi attachant·es.
Quelques semaines plus tard, autre lieu, autres jeunes « difficiles », autres parcours, même expérience. Les encadrant·es voulant absolument avoir le dessus sur des jeunes « difficiles », parce que « difficiles ».
Et vous savez quoi ? Ces jeunes aussi étaient adorables. Parfois obtus, avec des propos à m’arracher les yeux, mais il y a ce truc de… comment veulez-vous qu’iels aient confiance en les adultes si on les traite comme des inférieur·es ? Comment voulez-vous qu’iels acceptent de se remettre en question si les adultes responsables ne le font pas ?
Ces expériences renforcent mes envies à moi : former les adultes. En particulier les adultes au contact des jeunes. Et pour donner des formations à des adultes ET des jeunes, croyez moi, les adultes ne sont pas moins obtus et relous que les jeunes. Oh que non.
Vous trouvez que les jeunes font n’importe quoi ? Sans parler des problèmes structurels, est ce que vous vous êtes demandés comment vous traitiez les plus jeunes ? Avant de reprocher insultes, sexisme, manque de respect, racisme, est-ce que vous vous êtes demandé ce que vous pourriez faire de mieux ?
Bossez votre position, vos mots, vos actes. Reconnaissez quand vous dites ou faites de la merde, présentez vos excuses, agissez au delà des mots. Prenez vos responsabilités avant d’accuser les jeunes. On ne perd rien à se montrer intègre, juste et parfois vulnérable. On ne perd rien, à part son statut de dominant. Mais on y gagne respect et confiance.
Parce que vous savez quoi ? Les jeunes n’ont pas confiance en les adultes*. Et quand je vois comment les adultes interagissent avec elleux, leur incapacité à se remettre en question et à se penser supérieur : je comprends les jeunes.
* Couchot-Schiex & Moignard, 2020